Pourtant, cette mode manager-coach – souvent empreinte de bons sentiments un peu naïfs – peut s’avérer dangereuse. Vous devez y faire attention et le manipuler avec précaution.
Une pose aux contours mal définis
En combinant les résultats de diverses études sur le sujet, on constate que si la majorité des managers se considèrent comme de bons managers-coachs, la plupart d'entre eux confondent les notions de coaching et de conseil. De même, près de 25 % des salariés surestiment leurs compétences en coaching. On peut donc résumer la situation ainsi : tout le monde aspire à devenir manager-coach et croit en être capable, mais peu de gens savent vraiment ce que cela signifie, et encore moins maîtrisent vraiment les techniques nécessaires pour y parvenir.
Ces dernières années, le terme « coach » a progressivement perdu son sens. Tant qu’on a de plus en plus de soutien dans notre vie (coach sportif, coach de vie, coach nutrition…), n’importe qui peut devenir coach. Il n'y a qu'une seule étape à faire
considérons que chaque manager peut à son tour être un « manager-coach ».
Aussi, les missions exactes associées au poste de manager-coach sont elles-mêmes particulièrement dispersées.
En effet, le but d'un manager-coach peut être à la fois de suivre les performances de ses équipes et de jouer un rôle de facilitateur, un guide, parfois même un intermédiaire. Ensuite les attentes sont immenses : pour les responsables RH,Les managers devraient consacrer 36% de leur temps à incarner ce rôle avec leurs équipes, alors qu'en fait, c'est à direIls n'y passent que 9% de leur temps, souvent par manque de qualification.
Ainsi, avant de prétendre se glisser dans la peau (par ailleurs très séduisante) de manager-coach, il est important de comprendre les prérequis et les missions associées à un tel rôle.
Un métier en soi
Ultracrépidarisme (comportement consistant à exprimer une opinion sur des sujets sur lesquels on n'a aucune compétence crédible ou démontrée) s'est généralisé : nous sommes tous épidémiologistes, sélectionneurs de l'équipe de France, ou encore ministres de l'économie ou de la santé. Le problème est le même avec les coachs-managers. On a oublié qu'accompagner avec succès un individu dans son parcours professionnel ou personnel, qui peut être parfois douloureux, parfois décourageant, parfois décourageant, est un métier en soi, exigeant une expertise et des compétences qui ne s'improvisent pas.
Voici une liste non exhaustive qui met en évidence à quel point le poste de manager-coach diffère de celui de directeur général.mentor ou consultant.
Il est nécessaire :
- avoir suivi au moins une formation de coachingy compris les fondements méthodologiques et éthiques ;
- maîtriser différentes techniques et outils (analyse des systèmes, pratiques narratives, PNL, etc.) et savoir jongler avec l'un ou l'autre selon les situations ;
- occuper ce poste régulièrement (on a rarement un excellent formateur une fois par mois) ;
- pouvoir agir en toute autonomiene pas être lié par des conflits d’intérêts ou influencé par des liens affectifs qui pourraient biaiser le soutien ;
- être légitime aux yeux de la personne que vous soutenezqui peut se jouer à différents niveaux (hiérarchie, diplômes, expérience professionnelle, notoriété, etc.).
Des risques qui ne peuvent être ignorés
Le premier risque se mettre dans une position que l’on ne peut pas contrôler, c’est mettre en danger la personne que l’on tente de soutenir, voire s’exposer à des situations que l’on ne peut pas gérer. Cela inclut par exemple la nécessité de résoudre une situation d'épuisement professionnel ou de harcèlement, sans savoir comment faire. Il est facile d'imaginer les dégâts qu'un mauvais coach peut causer s'il donne des conseils totalement inappropriés ou, pire encore, s'il manipule la personne qu'il accompagne pour servir ses propres intérêts.
La capacité à accompagner et à faire grandir un individu ne dépend pas de l’empathie, de la capacité d’écoute ou encore de l’envie de bien faire, mais bien sûr d’une expertise avérée exercée avec modération.
Le principal risque est, sans le vouloir, légitimer une situation génératrice de mal-être. En effet, s'il ne joue pas son rôle, ne questionne pas suffisamment l'organisation, ou ne prend pas assez de recul sur ce qu'il voit, un mauvais manager-coach peut apporter une solution structurelle temporaire trompeuse. Par exempleen ne remettant pas suffisamment en cause le fonctionnement global d'une organisation et en concentrant ses efforts uniquement sur les méthodes de travail d'un salarié, Manager-coach mal formé elle risque de cristalliser le problème sur le salarié tout en légitimant un cadre qui est pourtant à l'origine du dysfonctionnement identifié.
C'est souvent le cas pour problèmes causés par le manque de communication, au sein d'une équipe. Le cadre créé, n'incitant pas au partage, commentaires honnêtes et l’écoute est souvent source d’un profond inconfort pour certains. Ne pas remettre en question la culture d'entreprise et ses processus peut conduire un mauvais manager-coach à faire croire à la personne coachée que le problème vient de lui, de sa façon de travailler, de son mode de vie, de son incapacité à atteindre les résultats…
Sans une certaine perspective et une approche systématique de la situation, il est impossible de traiter correctement le problème identifié.
Si l'on poursuit le raisonnement encore plus loin, on peut s'interroger sur l'opportunité d'un modèle économique qui pousse ses managers à devenir managers-coachs. N'est-ce pas une manière déguisée de se soustraire à la responsabilité que doit assumer tout employeur ? le développement professionnel de ses collaborateurs ? Devant la faillite de nombreux programmes de formation et autres LMS (learning management system : logiciel qui supporte et gère un processus d'apprentissage ou un parcours pédagogique) souvent déployés dans l'organisation sans aucun impact probant, la tentative de promouvoir le manager-coach sur le devant de la scène semble être une solution très opportune. solution. Mais la volonté de privilégier des réponses locales là où la logique globale a échoué nécessite un apprentissage intense de la part de ces managers, appelés à adopter une position nouvelle, très exigeante. Il n'est donc pas possible de développer une culture manager-coach à condition que l'organisation elle-même fasse pleinement usage de sa prérogative de formation.
Développer une culture d’apprentissage
Étant donné que de nombreuses entreprises n'ont pas encore pleinement reconnu leur responsabilité en matière de développement professionnel, il est possible de les encourager à le faire en suivant cette checklist :
- Demandez une définition claire du terme manager-coach et les responsabilités que cela implique. Il est important de vérifier qu’il ne s’agit pas de mentoring ou simplement de suivi de gestion classique.
- Assurez-vous d'être formé, tant sur les aspects théoriques du coaching que sur les compétences nécessaires (communication, écoute, techniques de questionnement, leadership, etc.) qui peuvent faire défaut. Une étude a montré que former un manager pendant 15 heures pour lui apprendre les bases du métier de manager-coach suffisait à augmenter de 40 % l'efficacité du coaching qu'il assurerait alors.
- Égalisez les attentes de chacun : de la hiérarchie, de la personne formée, mais aussi de vous-même.
- Assurez-vous d'avoir suffisamment de temps pour vous préparer et terminer cette nouvelle mission.
- Assurez-vous d’avoir le niveau d’indépendance nécessaire (d'esprit et d'action) pour remplir cette mission sans être gêné.
Ces actions permettront de développer des pratiques d’accompagnement professionnel durables, mais poseront également les bases d’une véritable culture de l’apprentissage. C’est souvent une étape nécessaire pour les organisations aspirantes devenir des entreprises apprenantes. En effet, comprendre les subtilités du métier de manager-coach est un pré-requis essentiel pour ancrer la formation dans le quotidien des collaborateurs.
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De plus en plus populaire depuis les années 1990, la notion de coaching s'est solidement implanté dans l'entreprise. La pose du « manager-coach ». s’est progressivement imposé dans des organisations désireuses de démocratiser la pratique du coaching en s’appuyant sur les forces vives de l’entreprise. Cette pratique trouve une résonance particulière avec la crise sanitaire que nous traversons : elle n'a jamais été aussi importante pour écouter, accompagner et rassurer vos équipes.