Changer ma vie, vendre ma maison, éduquer mes enfants, améliorer mon apparence, perdre du poids, apprendre à travailler en équipe… Les entraîneurs étaient sur le point de remplacer les psychologues pour nous aider à faire face à différentes situations. Mais que font-ils exactement ?
Sur C8 et NRJ 12, Pascal, le « grand frère » de la télé, sauve des familles menacées de déplacement, tandis que sur M6, la fée Cristina Cordula dégaine « un nouveau look pour une nouvelle vie » d’un coup de baguette magique. Avoir son propre entraîneur à la maison n’est plus réservé à quelques riches. La plupart des entreprises se tournent vers ces professionnels du support pour motiver les équipes en cas de besoin. Même l’État s’en sert pour former ses dirigeants. Et nous sommes de plus en plus nombreux à nous tourner vers ce métier en pensant à une reconversion professionnelle dans la quarantaine. A l’ère de l’individualisme qui isole, des familles éclatées et recomposées, de l’école qui ne sait plus toujours quel rôle jouer, nous sommes tous un peu perdus et à la recherche de guides – coachs – capables de nous fournir rapidement des programmes pour mieux vivre . Les signaux les plus courants – gérer nos émotions, améliorer nos relations et la façon dont nous communiquons sans nous attarder sur ce qui fait mal – correspondent parfaitement aux idéaux actuels de performance, de contrôle et de rapidité.
Les années 1980 ont été la reine de la psychanalyse. Sommes-nous entrés dans l’ère du coaching royal ? Les coachs remplacent-ils les psychothérapeutes ? Ce n’est pas si simple, car si le coaching est un travail sur soi, pour progresser, changer, résoudre une difficulté, ce n’est pas une étude du psychisme ou de notre histoire personnelle. Sa fonction est de nous aider à atteindre nos objectifs. C’est du côté « comment », pas du côté « pourquoi ». Il se concentre sur le bien-être où la psychothérapie est un traitement. Cependant, il existe de nombreux points de convergence entre ces techniques. Etymologiquement, coach désigne « coche », la calèche, alors le terme désignerait « le coach », « le dresseur », celui qui conduit l’élève vers la réussite. D’après Norbert Massia1, coach de vie, consultant en affaires et entraîneur sportif, « cette méthode puise ses racines dans la philosophie grecque. Comme Socrate, qui par la puissance et la pertinence de ses questions a permis à ses interlocuteurs de faire naître la vérité, le coach initie un dialogue qui va permettre au coaché de faire naître son propos.
Les coachs accompagnent les grandes étapes de la vie
Il existe deux grandes formes de coaching : celui pratiqué en entreprise, destiné à libérer la créativité, faciliter le dialogue et l’intelligence collective ; et coaching de vie qui comprend la formation sportive, l’image, l’école, le premier emploi et la recherche d’emploi (pour apprendre à chercher un emploi et se promouvoir). Chaque moment de la vie peut en bénéficier, de l’enfance à l’âge adulte. Une séance type dure environ une heure. En général, il faut compter entre six et douze séances, une par semaine, dont le prix varie de 90 à 200 euros selon l’objectif recherché.
La scolarisation connaît actuellement un succès particulier auprès des parents. Agnès, 37 ans, l’utilise pour sa fille Faustine, 10 ans : « Elle a beaucoup de mal à s’exprimer en classe, elle tremble à l’idée de parler. Mais avec ce type d’accompagnement, tout un travail intérieur se fait sur l’estime de soi. Et puis Armel, sa coach, qui est en fait une jeune enseignante formée au coaching, s’intéresse à la façon dont ça se passe en classe, à sa façon d’apprendre. Vraiment une approche que je recommanderais à quiconque si un enfant semble démotivé, que ses notes baissent ou qu’il est stressé par un examen. Et de préférence avant que les choses ne deviennent trop mauvaises. Il y a dix ans, pour résoudre les blocages de Faustine, Agnès aurait pris rendez-vous chez un psychiatre ou un pédopsychiatre. Aujourd’hui, cette solution d’accompagnement s’offre à elle.
Demandez un meilleur accompagnement
Mais que signifie exactement former, accompagner ? « Il s’agit d’être là pour la personne », répond Norbert Massia. La première rencontre est souvent entourée de confusion, la personne se plaint de ce qui ne va pas chez elle, exprime ses besoins, ses envies… Dès lors, il faut faire le tri afin de déterminer la véritable demande et déterminer dans quelle direction aller, tout en identifiant les « ressources » (atouts) et les obstacles. Ensuite, précise Norbert Massia, « accompagner une personne, c’est la suivre sur le chemin où elle est. Le coach et son client s’interrogent sur les progrès réalisés pour comprendre ce qui peut être amélioré ». Rien n’est possible entre coach et coach sans une « alliance ». En fait, c’est une mise en relation entre un individu qui souhaite changer, progresser, s’épanouir, et un autre qui, sans lui servir de GPS, l’incite à tester des solutions. Les professionnels affirment établir des relations beaucoup plus égalitaires avec leurs clients que celles qui se développent entre thérapeutes et patients. En fait, les coachs s’imaginent généralement que le coach a la solution et supposent qu’il sait ce dont ils ont besoin depuis un moment.
1. Norbert Massia dans son article « Why So Many Coaches ? sur networkcoaching.com.
Mettez-le en pratique
Une bonne partie du travail consiste à déconstruire les croyances limitantes. Magda, 48 ans, directrice de banque, s’est lancée dans le coaching en image pour surmonter sa dépression, persuadée qu’après la ménopause la vie d’une femme était finie : « Je suis venue voir mon entraîneur en disant que j’étais un ‘gros tas’, je me sentais lourde, dégoulinante de graisse, foutu. Après m’avoir permis de démêler toutes les horreurs que j’avais à raconter sur moi-même, il m’a calmement dit : « Maintenant, tu vas m’expliquer pourquoi tu es ici et ce que tu attends de l’entraînement. » Cela a mis fin à ma procrastination et j’ai pensé sur la définition de la demande et de son objectif : « Je veux redevenir désirable, et pour moi cela veut dire être plus sophistiquée. » Une nutritionniste lui prescrirait un régime, la formatrice lui faisait remettre en question son image d’elle-même en lui faisant essayer des vêtements qu’elle je ne porterais jamais Un des maîtres mots du coaching est l’expérimentation : testez et si ça ne marche pas, ce n’est pas grave, on recommence. Après cinq séances, Magda a retrouvé confiance.
Jasmine, 27 ans, employée d’une agence de voyages, souffrait de trop d’indulgence, mais pas d’une manière qui lui plaisait. Issue d’une famille où le corps féminin doit être caché aux regards, elle ne savait exprimer sa féminité qu’avec des tenues en cuir hyper provocantes, ce qui lui attirait parfois de gros ennuis : « Les hommes me prenaient pour une femme qui avait des fantasmes sadomasochistes, alors que Je suis un grand romantique. Ma formation a consisté à me montrer qu’il y avait d’autres façons d’être féminine et attirante, mais aussi que ma façon de m’habiller était une façon de me rebeller contre ma famille. La psychanalyse a beau confronter Jasmine à des fantasmes érotiques inconscients et expliquer son incapacité à vivre en couple, son coaching lui a permis d’être en harmonie avec ses valeurs et sa vision d’elle-même. Mais la jeune femme n’exclut pas de consulter un jour.
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Contrôler les envies
Le coaching est une approche « ici et maintenant » qui ne prétend pas explorer notre complexe d’Œdipe ou nos relations précoces avec nos parents, encore moins nos pulsions archaïques. Mais quand il s’agit de l’appliquer aux affaires, maman, papa et la violence fondamentale au cœur de la psyché humaine ne sont jamais loin. Et les entraîneurs ne sont pas toujours conscients de cette réalité. Mathilde, 47 ans, cadre dans une entreprise de la région lyonnaise, peut en témoigner : « Tout le service s’est réuni pour une journée dans une salle où ils nous ont initiés à la communication non violente car il y avait beaucoup de conflits entre nous. Surtout avec un collègue qui pensait que parler était une perte de temps et que seule la productivité comptait. Je me sentais vraiment mal à l’aise, j’avais l’impression d’être infantilisé. Et à la fin de la journée, je n’avais plus envie de discuter, mais de frapper. Comment interpréter un tel échec ? André de Chateauvilliers, professeur de coaching à l’université Paris-II et encadrant, n’est pas surpris : « Le premier groupe connu de tous, c’est la famille, et l’entreprise est le lieu privilégié pour rejouer les conflits familiaux non résolus. Aussi, la violence qui y règne parfois doit être entendue, et non réprimée ou stigmatisée, comme le font certaines techniques. Coacher, c’est aussi se confronter aux pulsions des individus, à leur inconscient. Mais de nombreux professionnels du coaching n’ont pas suffisamment exploré leur propre psychisme pour faire face à cela. Du coup, « ils peuvent facilement, à leur insu, enfermer les autres dans des pièges mentaux dont ils sont eux-mêmes prisonniers, et passer pour infantiles, voire abusifs », note Eva Matesanz, psychanalyste, coach de cadres et auteur, avec André de Châteauvieux, parÉrotiser l’entreprise (Harmattan). Selon les deux professionnels, ces attitudes s’expliquent par l’histoire même du coaching : « Les premiers coachs se comportaient souvent comme des gourous, se plaçant dans la position de pères tout-puissants. »
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La formation doit être améliorée
Les « bons » coachs se soumettent à l’encadrement de leur travail par des pairs plus expérimentés, et si nécessaire, envoient les clients trop coincés dans leurs problèmes vers des interlocuteurs plus adaptés. De plus, il n’est pas rare de rencontrer des professionnels à la fois coachs et psychanalystes. Cependant, dans ce vaste univers du coaching, qui, rappelons-le, est un métier non réglementé – contrairement à celui de psychothérapeute – il subsiste une grande incertitude quant à la formation des futurs professionnels. Premièrement, il propose plusieurs heures de formation en psychopathologie (l’étude des névroses et des personnalités difficiles). Après, « trop d’étudiants arrêtent l’encadrement dès qu’il n’est plus obligatoire et ne peuvent pas réfléchir aux raisons pour lesquelles ils ont choisi ce métier », déplore Eva Matesanz. A l’heure où, selon la Société Française de Coaching (la plus grande avec l’Association Européenne de Coaching et la Fédération Internationale de Coaching, ICF France) ce marché est pratiquement saturé, il est urgent que les lieux qui préparent à ce métier prennent conscience qu’être un bon coach est une question de connaissances théoriques, mais aussi de maturation et de clarté personnelle.
Pour plus tard
Où puis-je trouver un coach ?
Fédération Francophone des Coachs Professionnels : ffcpro.org.
Société Française de Coaching : sfcoach.org.
Conseil Européen du Mentorat et du Coaching (EMMCC France) : emccfrance.org.
Fédération Internationale des Coachs (ICF France) : coachfederation.fr.