INFO LE FIGARO.- Le groupe de réflexion progressiste de gauche Terra Nova a publié ce mardi une étude démontrant qu'améliorer la qualité de vie au travail rend les entreprises plus rentables.
Pour améliorer la compétitivité de la France, le gouvernement a réduit le coût du travail avec le CICE (crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi) et le pacte de responsabilité. Cependant, la performance d'un pays dépend également de sa capacité à produire des biens innovants et de qualité – ce qu'on appelle la compétitivité sans coûts. Cela nécessite des collaborateurs motivés et engagés et des organisations de travail adaptées. Or, ces aspects sont souvent négligés dans le débat. Faux, selon Terra Nova. Le groupe de réflexion, qui se définit comme démocrate et progressiste de gauche, a publié ce mardi une étude (rédigée par Emilie Bourdieu, Marie-Madeleine Perettier et Martin Richer), en partenariat avec La Fabrique de l'industrie et Anact, intitulée « Qualité de la vie professionnelle : levier de compétitivité », révèle en exclusivité Le Figaro.
Première leçon, qualité de vie au travail (QVT, dans le jargon social) et performance des entreprises sont étroitement liées. Ce QVT va au-delà des mesures d’agréments comme la décoration des bureaux ou les massages offerts aux salariés. Cela nécessite un environnement de travail dans lequel les employés se sentent engagés. Ainsi, selon une étude deInstitut Gallup, les unités de production qui font partie des 25 % d’unités où l’engagement est le plus fort ont un niveau de productivité 21 % supérieur à celles où l’engagement est le plus faible. La rentabilité est… 22 % plus élevée, l'absentéisme 37 % inférieur et les accidents du travail 48 % inférieurs. De même, selon une autre étude citée par Terra Nova, la mise en œuvre des meilleures pratiques de gestion – participation des employés à la prise de décision, incitations, développement des talents, formation, conditions de travail flexibles – augmente la rentabilité (un point de progrès dans cette mise en œuvre, augmentant le rendement de l'actif net de 4,6 %).
Dans les entreprises, un euro investi dans la prévention des risques psychosociaux entraînerait une économie de un à treize euros.
Démontrer l’intérêt de l’amélioration de la qualité de vie au travail peut également se faire en mesurant les coûts du stress. Terra Nova cite une étude de« INRS (Institut national de recherche et de sécurité pour la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles) et l'École des Arts et Métiers Paris Tech, les estimant entre 0,1 % et 0,15 % du PIB en France, incluant le coût des soins, les arrêts de travail, les prématurés cessation d’activité et décès prématuré. Dans les entreprises, selon une autre étude, un euro investi dans la prévention des risques psychosociaux entraînerait une économie de un à treize euros.
L'amélioration de la qualité de vie au travail s'accompagne aussi très souvent d'un changement dans l'organisation du travail et notamment dans les modes de management. En gros, il s'agit de passer d'un mode très hiérarchique et descendant à un mode où les membres de l'équipe sont plus impliqués dans les décisions et autonomes.
Le management est encore très hiérarchique en France
Le problème est que la France est en retard dans cette transformation. De nombreux indicateurs vont dans ce sens. Ainsi, selon une enquête européenne, 31 % des salariés français déclarent pouvoir influencer les décisions importantes pour leur travail, contre 38 % en Allemagne, 39 % en Espagne et 45 % au Royaume-Uni. En fait, dans l’Union européenne, seule la Slovaquie est classée moins bien. Pire encore, la situation semble s’être aggravée ces dernières années. Selon une enquête du ministère du Travail, la part des salariés qui déclarent que leur patron leur dit comment faire leur travail a augmenté entre les trois dernières vagues de l'enquête : 14,2 % en 1998, 18,4 % en 2005 et 19,3 % en 2013. » Le défi en France tient au fait que notre pays se caractérise à la fois par la mauvaise qualité du dialogue social (ndlr, entre patronat et syndicats), mais aussi du dialogue professionnel (ndlr, y compris les salariés parmi eux) » Terra. Nova souligne.
Sur une note plus positive, la France peut encore s'améliorer. Quelques grands patrons sont également impliqués dans ce développement : l'exploration Terra Nova est un prélude Jean-Dominique Sénard, le président du groupe Michelin, connu pour son appartenance sociale. « Par conséquent, améliorer la qualité de vie au travail et dialoguer sur le contenu, la finalité et l'organisation du travail n'est pas un luxe réservé à quelques entreprises soucieuses du bien-être de leurs salariés (…). Cela devient de plus en plus un levier clé de compétitivité », conclut Terra Nova.